Séminaire sur la libéralisation de l’enseignement supérieur, Dakar (août 2009)

Publié le par JC 76

Résolution finale

Depuis plusieurs années, le système d’enseignement supérieur et de recherche français subit de nombreuses attaques : LMD, LRU, démantèlement du CNRS, casse du statut des enseignants chercheurs… En regardant au-delà de l’Europe, tous les pays sont touchés par les mêmes attaques.
Edito

C’est pour ces raisons que l’UEC et son organisation sœur du Sénégal, le Mouvement des Elèves et Etudiants du Parti de l’Indépendance et du Travail (MEEPIT) ont organisé un séminaire sur la libéralisation de l’enseignement supérieur qui s’est tenu à Dakar du 11 au 13 aout 2009.


Rappelons le processus historique. En 1995, l’OMC signe l’Accord Général sur la Commercialisation des Services (AGCS), qui considère l’éducation comme une marchandise. A ses suites nous avons le conseil d’Europe et l’UNESCO-CEPES (Conseil Européen Pour l’Enseignement Supérieur) qui mettent en place en 1999 le traité Bologne et le processus de Lisbonne en 2001, dans l’objectif de créer un espace européen pour l’enseignement supérieur (à travers des réformes nationales comme le LMD et la LRU), basé sur le principe de créer « l’économie de la connaissance la plus compétitive au monde ».


Dans un contexte économique et social différent, en Afrique le CAMES (Conseil africain et malgache pour l’enseignement supérieur) et le REESAO (Réseau pour l’excellence de l’enseignement supérieur) se sont engagés à mettre en place une reconfiguration des programmes universitaires et de la structure des universités, suivant le modèle LMD. Il faut rappeler que les trois décennies qui ont suivi l’indépendance des pays d’Afrique ont été marquées par la création de nombreuses institutions nationales et transnationales d’enseignement supérieur au travers desquelles les anciennes puissances coloniales jouent un rôle important, comme c’est le cas du CAMES, crée en 1968, et dont le seul pays partenaire est la France. Les conditions d’études en Afrique sont depuis longtemps déplorables. Des étudiants se retrouvent à 5000 dans des amphithéâtres ne pouvant en accueillir seulement 1000. Pour les chambres étudiantes, attribuées au mérite, nous pouvons retrouver jusqu’à huit étudiants se partageant un 9m2. Mais la volonté de l’OMC de faire de l’enseignement supérieur un marché a bien d’autres conséquences. L’exigence de rentabilité à court terme des formations et la bataille idéologique sur l’employabilité tendent à renforcer toujours plus l’apprentissage de savoirs conformes aux besoins directs du marché du travail. La formation de qualité permettant ou à même de permettre la maitrise des outils de production, se limite alors à une simple reproduction sociale accessible aux détenteurs d’un capital social ou culturelle. La recherche est elle aussi placée sous la coupe des intérêts privés, faisant passer le besoin de rentabilité avant l’avancée des connaissances et la réponse aux besoins sociaux.


Ce séminaire nous a donc permis d’affiner nos analyses sur la stratégie mondiale de libéralisation de l’enseignement supérieur. Mais il nous a surtout permis de réfléchir à la mise en place d’une stratégie internationale afin de créer des cadres de travail sur cette question. Il a donc été décidé qu’à la suite de ce séminaire serait mis en place, dans le cadre de la FMJD (Fédération Mondiale de la Jeunesse Démocratique) des groupes de travail nationaux, régionaux et internationaux, travaillant sur les quatre grands thèmes de contre-projet abordés lors du séminaire : la mise en place d’une sécurité sociale des étudiants, les liens entre la formation et l’emploi, la place de la recherche dans la société et la démocratie universitaire. L’UEC continuera donc ce travail, avec ses partenaires internationaux comme dans les universités françaises, afin de mettre en place et de porter un projet cohérent pour l’université et la société de demain.

Mathilde Ferment, responsable internationale de l’UEC.

Résolution finale

Résolution commune du parti de l’indépendance et du travail(PIT), du mouvement des élèves et étudiants du PIT (MEEPIT), de l’Union de la jeunesse démocratique Alboury Ndiaye (UJDAN), du Mouvement des jeunes communiste de France (MJCF), de l’Union des étudiants communistes (UEC) de la Fédération mondiale de la jeunesse démocratique (FMJD) et du Syndicat autonome des enseignants du Sénégal (SUDES) prise lors du Séminaire de Dakar des 11, 12 et 13 Août 2009.


Ce séminaire a été d’une grande importance dans la mise en place d’une réflexion collective. Face aux stratégies globales de libéralisation de l’éducation il nous a paru nécessaire de répondre internationalement aux attaques de l’OMC et de ses valets locaux. L’analyse détaillée de la mise en application de la réforme LMD en Europe et en Afrique a permis de mettre en avant les correspondances et les spécificités nationales de ce processus.

A la lumière des débats, il paraît évident que la stratégie de travail internationale est adéquate. Il est maintenant important de poursuivre notre réflexion au sein de groupes de travail nationaux, régionaux et internationaux, qui pourraient être articulée dans le cadre de la FMJD. Ces groupes de travail, ouvert à l’ensemble des organisations progressistes, doivent participer à la nécessaire formation intellectuelle de l’ensemble des militants jeunes et étudiants.


Il est essentiel que ces groupes de travail poursuivent la réflexion en vue de créer des contre-pouvoirs efficaces. Pour cela, il nous semble nécessaire d’articuler notre réflexion autour de quatre différentes thématiques abordées durant le séminaire. La question des aides sociales et des conditions de vie étudiantes est incontournable. En effet, il est nécessaire pour que les étudiants puissent se former dans de bonnes conditions qu’ils aient l’esprit libéré des contraintes matérielles. Les conditions de travails des personnels, qui participent également à la bonne marche du système universitaire, doivent être revalorisées. L’intégralité des personnels, y compris dans le cas des doctorants, doit donc bénéficier de statuts protecteurs et de salaires décents.


La réforme LMD pose la question de la professionnalisation des filières. Les formations professionnelles sont construites pour répondre aux demandes du secteur privé, en transmettant des savoirs ponctuels, spécialisés et localisés. Elles s’opposent à l’intérêt des étudiants en générant une précarité du savoir, en mettant fin à la polyvalence et en détruisant la reconnaissance nationale du diplôme. En conséquence, nous devons défendre la place des savoirs universitaires, mais aussi redéfinir le lien entre université et travail afin de permettre aux travailleurs en formation d’être en maîtrise de leurs outils de production.


La place de la recherche, dans le « siècle des savoirs », est essentielle. Il nous faut réaffirmer que la recherche ne doit pas répondre aux exigences de rentabilité du capital, mais bien faire progresser les savoirs dans l’intérêt des peuples. Il est également nécessaire que les produits de la recherche soient largement diffusés au sein de la société civile afin que toute la population puisse se positionner sur l’ensemble des problématiques qui la traversent.

La production et la transmission des savoirs ne peuvent être soumises à des contraintes extérieures. Seule la démocratie doit guider le processus de recherche et d’enseignement. Pour cela, il est donc nécessaire que l’enseignement supérieur soit géré par l’ensemble des acteurs du monde universitaire, à savoir les étudiants, les enseignants, les personnels administratifs et l’Etat. Afin de garantir cette démocratie, il est obligatoire que l’Université soit financée intégralement par le public. L’Etat doit donc développer de nouvelles recettes et réorganiser sa politique budgétaire afin d’en garantir le bon fonctionnement.


L’enjeu est de taille, il nous faut réaffirmer auprès de la société civile que le partage égal des savoirs est fondamental pour la démocratie et le développement. Face à la loi du profit qui sous tend l’ensemble des réformes de l’éducation, il nous faut organiser une résistance efficace. Pour cela, les acteurs de ce séminaire s’engagent à l’élaboration de rencontre aussi régulière que possible. D’ici là, nous nous engageons à partager nos analyses, par tous les moyens de communications à notre disposition, et à nous tenir informer des évolutions de la privatisation du système éducatif dans nos différents pays.

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